On change d'énergie et on recommence ?

2022, année de tous les records pour 38 entreprises du CAC40 : chiffres d’affaires +22%, (1747 Milliards) ; profits +13,5%, (total de 138 milliards), dividendes distribués +22% (70 milliards). Dans le même temps, pour redresser les comptes publics en ignorant toujours ce qu’est un super profit, le locataire de Bercy entend imposer 10 milliards d’économie budgétaire en 2024, sur les dépenses de santé, les aides au logement et à l’emploi, la fin du bouclier énergétique et l’assurance chômage...

Au-delà du cynisme dont ces chiffres témoignent, s’ajoutent, on le sait, les inégalités que creusent la croissance économique. La juxtaposition de ces réalités à l’inaction écologique aide à comprendre les colères engendrées, avec réactions parfois violentes face à la répression policière.

Le luxe ne connaît pas la crise

Le luxe ne connaît pas la crise © Merci à Petr Kratochvil

Dans le même temps, sous la pression des agences de notation, Bruno Le Maire écarte d’office l’une des recommandations du rapport Pisani-Ferry proposant un financement annuel de 70 milliards jusqu’en 2030, nécessaire pour atteindre nos objectifs climatiques. Pourtant, ce rapport intitulé Incidences économiques de l’action pour le climat, commandé par la première ministre en 2022 laissait penser que les Accords de Paris de 2015 allaient enfin être pris au sérieux.

Sans surprise, ce rapport de 148 pages n’envisage que des solutions où la sacrosainte croissance et la profitabilité du capital sont préservées. Parlant des progrès de l’économie décarbonée, « Ils sont suffisamment amples et se déploient sur un champ suffisamment étendu pour qu’il soit permis d’y voir la promesse d’un nouveau modèle de croissance. » Allez, la messe est dite…

Pas tout à fait… A la page 48, on espère : « Il est aujourd’hui indispensable de réexaminer les fondements de nos conceptions de la liberté, du progrès et du bien-être ». Mais, aussitôt :« le thème de la décroissance est (…) socialement désastreux, car cela revient à demander à celles et ceux qui ont du mal à boucler leurs fins de mois de se serrer davantage la ceinture au nom de finalités supérieures. » Ah zut, on allait oublier les pauvres !

Les économistes de la doxa ne raisonnent qu’en chiffres. Ils ferment les yeux sur les multiples bilans de dégradations de la vie sociale, l’individualité, les pertes de savoirs et de sens qui, au-delà du problème écologique et son corollaire humanitaire, disqualifient le prétendu progrès des 50 dernières années.

Que les Français.es puissent, pour vivre mieux en rejetant l’aliénation consumériste, saisir cet impératif incontournable de déconsommation, qui dans tous les cas leur sera imposé, est inimaginable aux prétendues élites.

Or c’est précisément l’opportunité exceptionnelle d’une reprise en mains pour se débarrasser du capitalisme responsable de la catastrophe au profit d’un autre modèle humain, juste, et respectueux de la nature.

A la lecture de ce copieux rapport, les partisans d’une transition civilisée, en opposition à celle, barbare, déjà en marche (selon les mots d’André Gorz), comprendront que le compte à rebours est lancé, que la balle est encore dans notre camp, mais plus pour longtemps.

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